En 2010 nous avions lancé un dossier pour créer une fédération de slackline, mais nous avions finalement retiré le projet car nous avions estimé que l’activité devait rester libre et ne devait pas être encadrée par un comité qui dicterait des règles à suivre. C’était l’époque de Andy Lewis et de la naissance de la slacklife qui rejetait toute règle.
Cette année le projet refait surface dans la communauté avec un sondage pour requérir l’avis de tous. C’est une excellente initiative, mais à notre sens avant de choisir, il faut comprendre l’intérêt d’une fédération et surtout connaitre son programme.
La fédération est une reconnaissance au niveau sportif et politique. Certaines personnes ont besoin de reconnaissance, d’autres préfèrent rester discrètes et exercer leur art loin des projecteurs.
Les grands sports ont ainsi leur fédération, surtout en France, car c’est une instance politique qui permet l’officialisation de la pratique. Pour la slackline se serait sans doute le sacre. Un jour peut-être la slackline arrivera au jeux olympiques, qui sait ?
Ce qui’l faut savoir à notre sens, se sont les avantages et les inconvénients d’une fédération. Pour cela il faut regarder dans les autres fédérations qui sont proches de notre activité. On pense à l’escalade, au ski, au parachute, au parapente pour leur vocation à conventionner des secteurs, normer, établir des diplômes et organiser des compétitions.
Pour vivre une fédération a besoin d’adhésions, donc il faudra payer. Une partie de l’argent servira à financer une assurance car c’est obligatoire dans ce type d’organisation pour les pratiquants. L’assurance a vocation à couvrir 2 risques : couvrir ses propres blessures et couvrir les dommages causés aux tiers. Couvrir ses propres blessures c’est intéressant et rassurant surtout si l’on a pas de mutuelle où qu’on est blessé à l’étranger. Notre sport ne causant que très rarement des blessures, il est peu probable que l’assurance personnel soit d’une utilité essentiel comparé au sport comme le parapente où l’accidentologie est considérable. L’assurance pour les dommages causés aux tiers sert lorsqu’on risque de casser les biens d’autrui. Par exemple lorsqu’un parachute se pose sur des cables électriques, il peut être redevable de plusieurs milliers d’euros de dommages et intêrets et l’assurance joue son rôle. En slackline, la nécessité d’une assurance n’est donc pas fondamentale, bien que cela soit rassurant en théorie. Mais nous doutons que l’assurance fonctionne si des slackers sont condamnés pour avoir abimé l’écorse d’un arbre car c’est une faute intentionnelle au sens juridique du terme.
La fédération joue un très grand rôle dans l’uniformisation des diplômes et des compétitions. Les championnats officiels sont donc tous organisés par les fédérations. Ceux qui apprécient les médailles et les compétitions trouveront ainsi leur bonheur. On notera toutefois que les plus grandes compétitions de sports extrêmes se passent hors fédération comme les XGames. Le Rock the Line est aussi une remarquable initiative privée qui fonctionne. L’absence de fédération n’est donc pas synonyme d’absence de compétition finalement. Dans tous les cas, la jumpline serait sans doute la discipline phare.
Une autre caractéristique propre de la fédération est de créer des diplômes. On pense au BE et le privilège qu’il leur est donné d’enseigner aux débutants et délivrer des diplômes. Ils seront les profs de demain, il y aura des emplois à pourvoir. Les parents seront rassurés d’avoir des encadrants formés, même si aujourd’hui quelques amis expérimentés, une notice ou le net suffisent à installer une slackline. Mais il faut reconnaître qu’on voit un peu tout et n’importe quoi aujourd’hui : l’installation de highlines est dangereux et cela nécessite des connaissances pratiques certaines. Il ne faudrait pas que les installations futures deviennent le monopole de BE au risque de décourager de nombreux projets comme des festivals ou des démonstrations.
Les deux leviers tangibles qui pourront avoir un impact considérable dans nos activités sont l’équipement des sites et la possibilité de pratiquer dans des endroits qui sont pour l’instant interdits.
Pour ce qui est de l’équipement, il faut du budget et de la patience. Le budget prendra des années à obtenir, mais cela permettra d’équiper des sites proprement et durablement. On notera que de nombreux sites sont déjà équipés et qu’une partie du travail a déjà été fait bénévolement et proprement comme au Saussois par des passionnés. Cela permet d’éviter aux grimpeurs de râler. Le seul risque que nous voyons ici, est l’interdiction des variantes et l’obligation de n’utiliser que les points déjà posés et sécurisés. C’est le même principe qu’en escalade sur tous les sites conventionnés : il faut s’en tenir aux broches en place. Certains sites évoluent sans cette contrainte comme dans le Verdon où des passionnés ouvrent de nouvelles voies en goujons chaque année, pour le bonheur de tous. On apprécie souvent la logique des lignes, l’harmonie et la sécurité que privilégient les grimpeurs expérimentés. En highline, nous avons été plus d’une fois surpris par le bordel sans nom des ancrages avec parfois 20 points sur 5m2. On ne sait plus lesquels sont fiables ou pas. Il est clair que des broches de couleurs différentes que celles de la FFME aideraient positivement. C’est la responsabilité de chacun.
Pour ce qui est de l’accès à des secteurs protégés et au conventionnement, l’expérience de la FFME est que cela prend entre 2 ans et 10 ans pour conventionner un site. On notera que la FFME n’a jamais réussi à équiper un endroit qui lui a été interdit. La fédération de parapente n’a jamais réussi à obtenir la levée des interdictions de vols en secteurs protégés. Aussi, il faudra rester patient et ne pas se faire d’illusion. Il ne faudra pas croire qu’une fédération puisse faire l’impossible et que la fédération de slackline ne pourra sans doute pas lever des interdictions que la FFME n’arrivera pas à lever depuis 20 ans. Cependant un dialogue entre les deux fédérations pour trouver un terrain d’entente entre les deux mondes sera un plus et réconciliera slackeur et grimpeur, peut être. On espère en tout cas que l’une des premières priorités sera de convaincre les mairies de nous permettre de slacker en toute liberté dans les parcs communaux. Les footballeurs jouent sur la pelouse, nous, sur les arbres, pourquoi tolérer l’un et pas l’autre ?
Une fédération c’est donc avant tout une reconnaissance de notre activité. C’est ce qu’il faut en attendre principalement.
Chacun sera libre d’adhérer ou non et cela ne changera sans doute pas la manière de slacker de chacun de nous. Elle apportera plus de pratiquants, créera des opportunités mais aussi créera des contraintes. Il y a des gens qui aiment l’organisation, les règles, les compétitions, les endroits conventionnés et les autres qui vivent leur passion sans règle, sans norme et voient ça comme une aventure humaine, un pas dans l’inconnu, la liberté de marcher sur un fil au dessus du vide sur un spot qui a captivé leur imagination. Voilà donc le chemin qu’il faudra choisir la slacklife ou la slackfédération qui sont un même monde mais avec deux cultures différentes : l’un prône les règles, l’autre la liberté.
On apprécie donc la mise en place d’un sondage pour prendre les avis. C’est ici pour participer: https://docs.google.com/